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« Kamuyot » d’Ohad Naharin par la Cie Grenade

A Chaillot- Théâtre National de la Danse, la troupe dirigée par Josette Baïz s’est emparée de ce joyau de la danse Gaga.

Avec Kamuyot, Ohad Naharin s’adresse aux jeunes et il le fait savoir. Dans une bande son très éclectique, on distingue un moment où deux musiques se succèdent et forment comme une invitation: « Children of Israel » (sur une boucle dub) - « Do ya wanna dance ? » (en rock’n’roll). Sur ça, chaque danseur amène des enfants sur le plateau, pour quelques instants. D’abord un, puis deux, puis trois, et finalement quatre. La rencontre est festive, la construction limpide, l’esprit joyeux, dans un langage chorégraphique qui ressemble à une mosaïque, aussi bigarrée que la société israélienne.

Créée en 2003 et bien sûr en Israël, cette pièce redéfinit la manière de penser un spectacle intergénérationnel. Entre les danseurs et leur public, les barrières tombent. Une complicité s’installe. En cet après-midi automnal parisien, des groupes entiers d’écoliers, accompagnés à Chaillot par leurs professeurs, ont pris place autour de l’aire de jeu, quand les treize danseurs de la compagnie Grenade (menée par Josette Baïz) font passer le courant, dès le départ. Par l’apprentissage de la technique Gaga et la transmission de la pièce, assurés par deux assistants de Naharin, ils ont devenus les ambassadeurs de cet univers auprès d’un jeune public français, sans doute encore dubitatif par rapport à la danse contemporaine.

Galerie photo © Laurent Philippe

Ces jeunes voient-ils plutôt, dans ce patchwork savamment construit, l’esprit à la fois Gaga et Dada, ou perçoivent-ils l’incroyable discipline qui ouvre la voie vers cette liberté ? L’alchimie qui rend Kamuyot à la fois explosif et joyeux repose sur un jeu facétieux entre le suspense et l’inattendu et sur la cohérence paradoxale d’un zapping permanent qui suit des structures chorégraphiques montées en boucle. Il s’appuie sur une alternance presque rituelle entre explosions, accalmies, solos et unissons. Kamuyot amène les danseurs et le public aux sources de la technique Gaga. Unissons oblige, tout est chorégraphié avec la plus grande précision, et semble pourtant s’inventer à l’instant même. Cette impression est soutenue par un choix audacieux de Josette Baïz qui distribue les interprètes sur les différents rôles juste avant l’entrée en scène. D’où une vitalité organique toute particulière.

Au départ, le projet Kamuyot repose sur un autre choix de Baïz, celui de privilégier la transmission à une nouvelle création personnelle.  Mettre en retrait sa propre carrière de chorégraphe témoigne de son engagement en faveur d’un projet global, projet qui reflète une vision solidaire du vivre-ensemble. En son aboutissement, Kamuyot représente bel et bien la synthèse des deux volets du projet Grenade, à savoir la compagnie avec ses interprètes majeurs et le Groupe, avec les jeunes en formation, cet ensemble dynamique qui multiplie les programmes pour lesquels les plus grand.e.s chorégraphes transmettent des extraits de leur répertoire ou créent des pièces brèves, dans l’idée de faire de la danse contemporaine un événement à partager entre toutes les générations. Avec Kamuyot, Compagnie et Groupe Grenade avancent dans la même direction.

Thomas Hahn

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