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« Branle » de Madeleine Fournier

En création mondiale à l’Atelier de Paris, Branle joue des époques et des styles dans une fête joyeuse et pleine d’humour.

Le branle est une danse de la fin du moyen-âge ou du début de la Renaissance, dont on ne sait s’il est d’origine savante ou populaire, les danses traditionnelles et les danses de cour s’influençant mutuellement tout au long de leur histoire, ni même si ce terme désigne une danse particulière ou tout simplement le fait de danser. En chaîne ou en ronde, il consiste à effectuer trois pas en avant et deux en arrière. Il est enrichi de tours, de sauts, de mimiques, de jeux et se danse à la cour de manière compassée, et de façon gaillarde aux champs. Une seule certitude, il est traversé d’une oscillation, d’un léger mouvement de va et vient que l’on retrouve dans les expressions « se mettre en branle » ou « être ébranlé ». Il peut-être grotesque – un genre que l’on appréciait particulièrement à l’époque, ou sérieux, on y ajoutait des objets, par exemple pour le « branle du chandelier », ou des figures diverses.

Madeleine Fournier utilise tout cet imaginaire sans omettre, bien sûr, l’équivoque du mot pour créer Branle. qui part effectivement de ce pas issu de la bourrée à deux temps du Bourbonnais, (parfois appelée "branle" dans le Berry), et qui se déploie sur différents tempi et plans dans l’espace, s’élançant joyeusement après la « messe » des affects, soit des passages de L’Ethique de Spinoza, dits de façon très sacerdotale par Marion Cousin, chanteuse et comédienne. Julien Desailly peut alors mettre en branle son instrument (médiéval), la chevrette, qui commence par quelques cris et vents avant de prendre son souffle et d’accompagner la totalité de la pièce d’un son un peu acide mais familier.

Habillés en « Fous » du XIVe siècle pour le bas avec leurs collants bicolores et en T-shirts ou en chemises larges tout à fait actuels pour le haut, chaussés de « zizis », ces merveilleux et si souples richelieus de chez Repetto, ils répètent invariablement le motif jusqu’à l’épuiser s’avançant et s’éloignant sans cesse avant de former des ensembles et surtout des chaînes qui nous rappellent les danses de Saint-Guy ou les chorées mythiques comme celle de Strasbourg (1518). Les danseurs lâchent alors leur bel ordonnancement de lignes et de courbes bien mesurées, leurs mouvements deviennent désordonnés, plus saccadés, et surtout beaucoup plus imprévisibles. Jambes et bustes se dissocient, comme appartenant à des registres différents, et partent dans tous les sens. Les unes gambillent, tandis que les autres s’attellent à leurs tâches quotidiennes.

Galerie photo © Patrick Berger 

C’est alors que Madeleine Fournier choisit d’introduire un œuf, puis plusieurs sur le plateau, rendant par sa fragilité, la danse périlleuse. Au même moment, la chorégraphie s’accentue, les corps se ploient, ou plongent vers l’arrière, voire tombent, inventant une forme de burlesque contemporain. Le chant prend le pas sur la chevrette, et les danseuses et danseurs laissent éclater leurs émotions, telles que décrites dans la liturgie du début, amour, honte, joie, colère, tristesse… Dégingandés, un peu hagards, se frottant ou se touchant, se soulevant ou se portant, brisant une coquille au passage, la petite troupe des six interprètes se laisse aller à une transe joyeuse où la lubricité sera énoncée comme étant le dernier mot.

Agnès Izrine

Vu le 18 novembre à l’Atelier de Paris, dans le cadre du Festival d’Automne

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En tournée 
Les 24 et 25 novembre au Next Festival, Kunstencentrum BUDA, Courtrai (BE),
Du 7 au 9 décembre au CND Pantin,
Le 17 janvier au Gallia Théâtre, Saintes,
Les 22 et 23 mars à La Raffinerie Charleroi Danse, Bruxelles.

Distribution 
Chorégraphie, Madeleine Fournier
Interprètes, Mathilde Bonicel, Madeleine Fournier, Sonia Garcia, Flora Gaudin, Johann Nöhles, Marie Orts
Musique, Marion Cousin, Julien Desailly, Assistant, Jérôme Andrieu, Lumière, Nicolas Marie
Transmission bourrée 2 temps, Solange Panis,
Costumes, Valentine Solé
Maquilleuse, Lou Thonet
Régie son, Vincent Domenet
Régie générale, Leslie Vignaud

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