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« Toyi Toyi »: Hors Série meets Via Kathlehong

La nouvelle création de Hamid Ben Mahi offre une plongée dans la vie des townships d’Afrique du Sud.

« My life is an emergency »: Ma vie est une urgence. Les trois virtuoses venus du township de Kathlehong en Afrique du Sud n’exagèrent rien. Mais leur urgence est joyeuse et galvanise le public, heureux d’ajouter au spectacle de danse un voyage et une rencontre humaine. La salle applaudit debout et répond on scandant: « On n’est pas fatigués ! ». A Biarritz, au Temps d’aimer, ils ont pris le temps d’aimer, chaudement...

Un intrus français

Les trois danseurs de la compagnie VIA Kathlehong et leur ami français Frédéric Faula, surnommé « Télélé » (Le grand) sont venus en ambassadeurs: Que signifie vivre dans un township, y aller à l’école, y grandir, y danser et chanter ? Le plateau devient une place publique, un carrefour à Kathlehong où Hamid Ben Mahi, le chorégraphe de la compagnie bordelaise Hors Série, est allé à la rencontre des danseurs, non pour leur octroyer un concept chorégraphique occidental préconçu, mais pour leur permettre d’être libres dans un spectacle pour les scènes européennes (ils en ont vu d’autres, puisque tous les chorégraphes accueillis par VIA Kathlehong n’ont pas eu la même délicatesse).

Manifester en dansant

La Toyi Toyi est une danse revendicative qui était pratiquée dans les manifestations, liée à des chants engagés et interdite sous l’apartheid. Sur scène, Vusi Mdoyi, figure de proue de VIA Kathlehong, Mpiyakhe Faleni et Buru Mohlabene font fuser les pas de Pantsula, Gumboots ou Breakdance comme ils le feraient chez eux, dans les ruelles qu’on voit défiler en vidéo. Le spectacle Toyi Toyi puise sa force dans cette véracité. La danse devient ici un enjeu essentiel, au-delà d’elle-même, au-delà du plateau. La virtuosité des interprètes éclate tel qu’eux-mêmes le jugent opportun.

Ben Mahi, poète de la lutte

Avec sa dramaturgie sensible et d’une sobriété exemplaire, Ben Mahi réussit à poétiser la vie dans les townships, l’énergie communicative des habitants et leur désir de se raconter, sans jamais tomber dans les pièges du documentaire, du misérabilisme ou du pathos. Tout se raconte au feeling, par les énergies. Et ça marche à merveille.

Galerie photo © Stéphane Bellocq

La retenue et la doigté de Ben Mahi, qui met en scène plus qu’il ne chorégraphie, sont salutaires. Derrière l’apparente simplicité du résultat se cachent d’énormes qualités artistiques et humaines. Toyi Toyi, et la présence de Frédéric Faula, incarnent la rencontre: Les townships sortent de leur long isolement. Ce message positif est pleinement ressenti et reçu. Au Temps d’aimer, le public a rencontré ceux qu’il aima, plus que tous les autres.

Thomas Hahn

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