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"JIMMY" de Pierre Pontvianne

Ce solo pour Jazz Barbé créé à June Events révèle et déploie ce que dégage exclusivement un individu, son énergie singulière, son idiosyncrasie radicale.

Pierre Pontvianne, après Œ [lire notre critique], revient à la forme solo avec Jazz Barbé, un de ses danseurs complice, comme il l’avait fait avec Marthe Krummenacher pour Janet on the roof [lire notre critique]. D’ailleurs, il y a comme une vague parenté entre les deux. Dans la construction chorégraphique d’abord, structurée par des césures alarmantes, par le bleu ensuite, qui passe du justaucorps de Janet/Marthe, au bonnet et bientôt à la lumière qui baigne Jazz Barbé, et enfin, au visage et surtout aux yeux, cachés par les cheveux de Marthe ou le bonnet de Jazz. Et justement, dans JIMMY, la première image insiste sur l’impossibilité de distinguer le regard de Jazz Barbé, celui-ci étant dissimulé par une perche portant l’inscription MCMLXXXI (1981). Comme nous ne pensons pas que ce soit un hommage à François Mitterrand, parions donc plutôt sur l’âge de l’interprète – ou celui du chorégraphe ! Ou la date d’un événement traumatisant – ce que suggèrent toujours les coupures intempestives avec cri, comme le bruit de flambée ou d’incendie.

A l’intérieur de ce cadre se déploie une sorte de gimmick ou de kata, extrêmement graphique dans sa gestuelle. Les mains, les avant-bras s’avancent à angle droit, les épaules s’engagent, il se plie se met à quatre pattes en se reposant sur ses poings bras tendus. Ou au sol comme assis de profil une jambe croisée sur le genou. Il faitun mudra de biche.  Ou allongé à plat ventre mains au sol. Ses bras se croisent comme pour siginifier la Mort dans la pantomime. Puis ça recommence. Deux dimensions, trois dimensions, le corps joue sur ses épaisseurs, ses dessins qui ressemblent presque à des pictogrammes avec ces mouvements très carrés, dépouillés de tout affect. Pourtant, quand il reprend sa position à quatre pattes poings dans le sol, on dirait le vigile et son chien réunis.

S’ébauchent alors quelques rondeurs dans les roulades au sol, une certaine fluidité envahit ses articulations quand il enchaîne les différentes séquences, comme un homme-culbuto descendant une vitre. Et ça repasse. Le bleu s’impose. JIMMY apparaît alors comme un animal blessé, le rescapé d’une nuit d’insomnie, le corps froissé comme un drap. Tout recommence. La main se fait griffe, les jambes se déplient, la gestuelle devient souple. Peu à peu, s’infiltre une vague forme de narration, le mouvement se creuse, s’élève, vibre. Certaines parties du corps semblent s’animer, les doigts qui se font plus insistants, le poids de la tête paraît insurmontable… JIMMY ou son représentant se déplace latéralement au sol quand soudain tout s’embrase. La fumée envahit le plateau et JIMMY disparaît dans cette fournaise avant de revenir transfiguré, sujet d’une accélération vertigineuse dont on ne saura pas si elle le sauve ou le conduit à sa perte..

Un spectacle en fusion, dans tous les sens du terme !

Agnès Izrine

Le 22 mai 2024, Théâtre de l’Aquarium dans le cadre du festival June Events.

 

 

 

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