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« Journal d’un seul jour »

Dans la gare de La Part Dieu, une femme attend. Droite dans son ciré rouge, le regard fixe, elle se tient sur l’un des escaliers du vaste hall d’accueil. Dans quelques minutes, elle se lancera à la poursuite d’une jeune femme blonde, qui elle-même se livrera ensuite à un étrange ballet pour escalier mécanique avec un homme en blanc.

Photos © Pierre Namas

Tout autour, les passants s’arrêtent, s’interrogent, allant même jusqu’à proposer leur aide à la femme en rouge si manifestement désemparée, ou vont et viennent indifférents. Plus tard, on retrouve le trio sur le parvis extérieur, minéral et désincarné, pour un étrange pas de deux à distance et un solo immobile, mais en hauteur.

C’est ainsi que débutera le 6 mai, à 18h56 sur la voie C, le ‘Journal d’un seul jour’ imaginé par Annick Charlot. Créé avec le soutien de la Maison de la Danse, co-productrice de ce projet Hors-les-murs, ce spectacle atypique se déploiera durant 24 heures sur l’espace lyonnais, à mi chemin entre la performance et le feuilleton dansé.

Les trois interprètes - Annick Charlot elle-même, Emilie Harache et Jérémy Paon - sont les protagonistes d’une histoire d’amour dont on suit les chassés croisés sur une journée, grâce aux moments dansés mais aussi aux images et vidéos et mises en ligne pendant la représentation.

« Le public, inscrit à l’avance, sera convié à divers rendez-vous, explique la chorégraphe. La gare, un commissariat, une terrasse de café, un hôtel, un hypermarché, sur un pont… jusqu’au lendemain 19h. Soit au total huit épisodes live allant de 15 à 60 mn. Entre temps, il recevra sur sa tablette ou son portable sept séquences filmées lui permettant de ‘voir’  ce qui se passe hors de son regard, et neuf actualités numériques, messages écrits, voix ou sons, l’informant du déroulement de l’action ».

Des points relais, sous forme de totems sonores et visuels, seront également installés à proximité des lieux de ‘représentation’ pour répondre à la curiosité des passants. L’espace urbain deviendra ainsi une immense scène vivante, éclatée, où le réel remet sans cesse en jeu la narration initiale.

Préparée depuis un an au cours de résidences de création, cette saga chorégraphique à la fois intime et publique a reçu le soutien de plusieurs partenaires, institutionnels et privés. En ces temps de Vigipirate aggravé, on imagine sans peine l’énergie qu’il aura fallu déployer pour obtenir les autorisations nécessaires, que ce soit pour jouer dans la gare ou pour installer la drôle de nacelle suspendue au flanc de la Bibliothèque municipale. Heureusement, en la matière, Annick Charlot n’en est pas à son coup d’essai. Désireuse de « partager la danse et faire société », la directrice depuis 2000 de la compagnie Acte délaisse délibérément les théâtres et autres salles de spectacle.

Depuis son Studio des Hérideaux dans  le 8e arrondissement lyonnais, elle inscrit son travail au cœur même du quotidien et crée des œuvres chorégraphiques qui sont autant d’irruptions poétiques dans la ville. Baptisée Lieu d’Etre, sa précédente pièce, en co-production avec la Biennale de la danse de Lyon 2010, était un « manifeste pour l’utopie d’habiter ». Recomposée à chaque fois in situ avec les habitants, cette création nomade déjà représentée à Lyon, Vienne, Riom ou Paris, continue aujourd’hui encore son chemin sur de nouvelles étapes. Ce sera peut-être aussi le destin de ce Journal d’un seul jour, conçu pour s’adapter et se reconfigurer dans une interaction constante avec son environnement.

Isabelle Calabre 

Les 6 et 7 mai à Lyon, inscriptions à la Maison de la Danse de Lyon.

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