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« Les rois de la piste » de Thomas Lebrun

Le directeur du CCN de Tours ressuscite les stars des années 80 dans une savoureuse pièce aigre douce. À voir du 30 janvier au 3 février au Moi de la danse aux Subsistances de Lyon.

En se lâchant sur des musiques des années 80 près de quarante personnages dévoilent leurs intimités et leurs fantasmes.

Qui n’a pas au moins une fois dans sa vie dansé au centre d’un groupe en discothèque ou lors d’une fête ? Durant ces quelques instants, emballé par la musique, on se lâche et c’est presque le fameux quart d’heure de célébrité d’Andy Warhol.

Mais comme le démontre Thomas Lebrun, être pour quelques minutes le roi de la piste engendre une multitude d’échos plus ou moins tragi-comiques.

C’est sur des tubes des années 70 et 80 que le chorégraphe a composé sa dernière création pour cinq danseurs qui interprètent près de quarante personnages dotés de costumes invraisemblables.

Et là, sur un podium lumineux, défilent des gens de toutes classes sociales qui se dévergondent sans retenue et peuvent ainsi faire exploser leurs fantasmes, leurs faiblesses, leurs folies, leurs délires, leurs craintes et leurs réserves.

Ils sont mis en lumière et doivent impérativement assurer. C’est pourquoi rien ne les arrête. Dans des danses effrénées ils racontent un lambeau de leurs intimités.

Ces démonstrations dotées d’un humour délirant, permettent de faire défiler des êtres dont on devine qu’ils jouent là le rôle de leur vie. Prête à tout pour séduire, la femme à la robe rouge est la seule à revenir régulièrement. On devine chez elle une intense solitude et c’est la raison pour laquelle elle termine sa prestation à moitié dévêtue et pas mal imbibée d’alcool. Il y a aussi le transsexuel, le puceau, la timide, le drogué, le chippendale, celle, pitoyable, dont la robe trop courte et trop collante laisse apparaitre sa culotte, le couple érotique, la snob, la dragueuse, le gay… soit des mises à nu conscientes ou inconscientes de danseurs qui se libèrent de tout carcan avec l’unique objectif : être vus.

Dans un rythme très soutenu, ces déchainements s’emboitent comme si il y avait effectivement quarante interprètes tant ils changent de costume à une vitesse incroyable. Ors, ils ne sont que cinq et sont à chaque fois totalement immergés dans leurs rôles imposés par Thomas.

Puis, vêtus de justaucorps noirs en dentelle, ils forment un quintet inquiétant et provocant. Ces trois hommes et deux femmes ne font plus qu’un. Un pour défiler, s’exhiber, se séduire, se caresser, se nourrir de l’autre.

Comme le dit Thomas Lebrun, Les rois de la piste s’inscrit comme une critique sociale ciblant la nécessité de séduction dans une danse populaire. « Tout démarre de la funk, de ce pas de danse qui faisait chalouper les postérieurs et les avant-bras de tous ceux qui monopolisaient les pistes de danses des discothèques de toutes régions et de nombreux pays ! Bref, un pas de danse universel ! À chacun sa singularité ! »

Galerie photo © Frédéric Iovino

Le chorégraphe revient vers ses premières amours en étant acerbe, provocateur, émouvant et drôle avec une écriture fougueuse et déraisonnable. Magistralement bien pensé et bien interprété, Les rois de la piste est une délicieuse et savoureuse plaisanterie, une vitrine mensongère où la danse et la mode ont toujours joué un rôle clé à partir des années 70. Son analyse aigre douce et satirique de la société prouve que rien n’a vraiment changé car en se mettant ainsi en lumière sans aucune pudeur, cette imitation des stars des années 80 prouve que l’exhibition (comme on en voit dans les séries de téléréalité) ainsi que la solitude sont toujours d’actualité.

Sophie Lesort

30 janvier au 3 février : MOI de la danse aux Subsistances, Lyon.

Chorégraphie : Thomas Lebrun
Interprétation : Julie Bougard, Thomas Lebrun, Matthieu Patarozzi, Veronique Teindas, Yohann Têté
Musiques: Shlomi Aber, C+C Music Factory, Cher, Corona, Gloria Gaynor, Grauzone, Miss Fitz, Snap!, Donna Summer, Technotronic Montage son : Maxime Fabre, Yohann Têté
Création et régie lumière : Jean-Philippe Filleul Création et régie son : Maxime Fabre
Costumes : Thomas Lebrun Réalisation costumes : Kite Vollard
Construction du décor : Ateliers de la MCB° Maison de la Culture de Bourges/Scène nationale

Pièce à partir de 16 ans.  

08 et 09/12/2016 – La Comédie, centre dramatique national Drôme Ardèche.
13/12/2016 – MA, Scène Nationale – Montbéliard
17 et 18/01/2017 - Festival Faits d’hiver, Carreau du Temple - Paris
28 et 29/03/2017 - Théâtre du Merlan - Marseille
07/04/2017 – Festival Le Grand Bain, La Condition Publique - Roubaix
21/04/2017 - Le Prisme – Elancourt

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