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Le temps d’Aimer : « Serenity Suite » de Matxalen Bilbao

Belle découverte que ce duo venu de Bilbao, qui met en scène un processus de transmission. Authentique, sensible et symbolique.

Les échanges et la coopération avec le Pays Basque espagnol sont un axe majeur de la mission de Thierry Malandain à Biarritz. C’est vrai pour le directeur du Centre National Chorégraphique qu’il est, et aussi pour son action à la direction artistique du festival Le Temps d’Aimer. Avec Matxalen Bilbao, le festival a accueilli une figure majeure de la danse contemporaine de cette région frontalière.

Et si la chorégraphe porte le nom de la ville dans laquelle elle travaille, on dit que ce n’est en rien un artefact, mais une simple coïncidence. La consonance très euskari de son prénom n’enlève rien au fait qu’elle représente la danse contemporaine en tant que telle, touchant même aux origines de celle-ci. Pas de référence au patrimoine basque ici, si ce n’est un appétit naturel et quasiment sensuel pour le contact avec le sol, qui s’exprime dans un toucher particulier par la plante des pieds.

Duo ou processus ?

Dans Serenity Suite, Bilbao met en scène un processus de transmission entre elle-même et une jeune danseuse de sa compagnie, Natalia Garcia. Se joue alors une sensation de découverte. Celle-ci ne concerne ne le vocabulaire, ni le style et n’est donc pas à vivre de façon unilatérale par le spectateur.

Car il y a là une première découvreuse, et elle s’appelle Matxalen Bilbao. Avec elle, tout semble se jouer dans l’instant même, grâce à sa sincérité et son authenticité. Bilbao nous transmet donc ses propres sensations. La fusion entre l’intime et le geste est totale, dans une sensibilité absolue pour l’espace, l’air et les durées, comme si la danse contemporaine elle-même naissait sous nos yeux.

Et puis, il y a Natalia Garcia. Entre les deux se tisse un dialogue sensible et vibrant, où la transmission dépasse de loin la simple récupération des gestes. Chacune s’adonne au regard de l’autre, en face à face ou bien en décalé dans l’espace, si bien que le sujet de Serenity Suite n’est pas tant le solo de départ (créé il y a seize ans, et logiquement intitulé Serenity), mais la connexion entre les deux interprètes. Il devient alors impossible de définir ce qu’on est en train de voir: La création d’un duo ou la mise en scène d’un processus ?

Galerie photo © Stéphane Bellocq

La danse comme lien à travers le temps

Le temps écoulé en serait le sujet, selon la note d’intention de la chorégraphe qui insiste sur la différence d’âge entre les deux, quasiment une trentaine d’années. Mais cette différence semble s’estomper. Voilà plutôt deux amies au lieu d’une relation mère-fille ou autrement hiérarchisée. Jusqu’au moment où les deux sont assises pour regarder la projection d’une vidéo chimérique. Bilbao danse, seule, et le temps en question devient celui de la danse dans son ensemble : Le temps sépare, mais la danse fait le lien.

Et c’est Garcia qui interprète, en espagnol, un texte qui exprime le ressenti de Bilbao: « Danser, sauter jusqu’à vieillir, durer jusqu’à ne plus pouvoir, durer jusqu’à longtemps après. Je suis à nouveau debout. Imprécise, inexacte, mais debout. Voilà mon corps, me voilà. » La force de Serenity Suite réside en la simplicité et la véracité de cet acte et des présences.

On songe alors à Daniel Larrieu qui a transmis son solo Emmy à Enzo Pauchet [lire notre compte rendu], aux Hivernales de 2018, où on a pu assister à une séance de transmission toute aussi touchante. Et s’il y avait, dans ce processus, une mine à exploiter pour la danse contemporaine?

Thomas Hahn

Festival Le Temps d’Aimer, Biarritz, Le Colisée, 11 septembre 2019

Prochaines dates :

- 26 septembre : Festival D´ici Danse, Saint Germain du Puch
- 8/9 octobre : Festival Territorio Danza, Sala Cuarta Pared, Madrid
- 2/3 novembre : Festival CatropiezasT, eatro Ensalle, Vigo
- 14 novembre : Museo en Danza, Museo de Navarra, Pamplona
- 23/24 novembre, Teatro Victoria, Tenerife

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