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Bel, Millepied, Robbins à l'Opéra

Un jour seulement après la démission de son directeur, le Ballet de l’Opéra de Paris proposait sa dernière création La Nuit s’achève, entourée de Tombe de Jérôme Bel et des Variations Goldberg monument de J.S. Bach et Jerome Robbins.

Galerie photo : Laurent Philippe

Avec une sorte de fébrilité Amandine Albisson et Hervé Moreau, Sae Eun Park et Marc Moreau, et Ida Viikinkoski et Jérémy-Loup Quer ont excellé dans les voltes et virevoltes passionnées, tout en lyrisme. Les couples sont d’un équilibre parfait, et se complètent à merveille. Albisson et Moreau (Hervé) développent une veine dramatique, Park et Moreau (Marc) une sorte de profondeur tout en légèreté, et Viikinkoski et Quer ont la nervosité ombrageuse de jeunes poulains. D’une technique parfaite, voire impressionnante (surtout quand il s’agit de Sae Eun Park), les danseurs ont épousé la partition de Beethoven avec brio.

Galerie photo : Laurent Philippe

Profondément romantique, un peu nostalgique et même sentimentale, c’est, sans doute, une des plus belles pièces de Millepied, saluée comme il se doit, par le public, tandis que le directeur sortant semblait plutôt ému ce soir là.

"Les Variations Goldberg" Galerie photo : Laurent Philippe

Les Variations Goldberg sont un chef-d’œuvre de composition. C’est vrai pour Bach comme pour Robbins. Mêlant non sans malice une sorte d’histoire de la danse comme en témoigne le premier couple qui forme le « thème » de ces variations, à une progression de difficultés techniques qui n’est pas sans rappeler Etudes d’Harald Lander, Robbins donne une véritable leçon de chorégraphie et de contrepoint.

"Les Variations Goldberg" Galerie photo : Laurent Philippe

On sait que Robbins aurait pu tout aussi bien être musicien et ici, ça éclate au grand jour. Quarante-sept danseurs s’élancent sur le plateau et jouent leur partie, tandis que Simone Dinnerstein égrène de manière lumineuse et virtuose le texte de Bach. La complexité de la construction est balayée par le génie de Robbins qui rend invisibles les points de montage entre chaque séquence.

"Les Variations Goldberg" Galerie photo : Laurent Philippe

Les danseurs de l’Opéra sont plus excellents les uns que les autres : précis, justes dans leurs intentions, légers, racés. C’est un vrai festival. Les étoiles (Myriam Ould-Braham, Laura Hecquet, Ludmila Pagliero, Josua Hoffalt, Mathieu Ganio et Karl Paquette) de la deuxième partie ne sont pas en reste et attestent que leur titre n’est pas volé.

"Les Variations Goldberg" Galerie photo : Laurent Philippe

Jérôme Bel n’a jamais été « chorégraphe » c’est plutôt un metteur en scène qui dit quelque chose de la danse. À son actif, quelques belles réussites, comme ce Véronique Doisneau créé en 2004 pour la danseuse du même nom. Réussite parce que cette pièce collait à la peau de ce Sujet de l’Opéra et heurtait de plein fouet le ballet classique et l’institution. On n’en dira pas autant de Tombe.

"Tombe" Galerie photo : Laurent Philippe

Malgré les sujets émouvants que sont Sandra Escudé et Sylviane Milley, à savoir une jeune femme qui interprète Giselle en fauteil roulant, et une vieille spectatrice assidue de l’Opéra (qui sera finalement montrée dans une vidéo de répétition) malgré les interprètes de l’Opéra de Paris qui sont vraiment très bons dans Tombe, on ne peut qu’être agacé par la complaisance qui guide Jérôme Bel.

"Tombe" Galerie photo : Laurent Philippe

Le principe est simple : Gregory Gaillard, Sébastien Bertaud et l’étoile Benjamin Pech ont invité à danser une personne « avec laquelle ils n’auraient jamais pu partager la scène de l’Opéra ». Pourquoi pas.D’ailleurs, Sandra Escudé et Sébastien Bertaud dégagent une vraie poésie car ils y sont authentiques. Mais il se trouve que Sandra Escudé, n'a rien d'une amateure loin de la danse. Elle est justement une danseuse professionnelle ! (lire notre entretien)

"Tombe" Galerie photo : Laurent Philippe

Mais pourquoi aller chercher une sorte de palette des « différences » (l'âge, le handicap, l'origine) ? Comme s’il suffisait de montrer selon l’expression consacrée « la diversité des publics » sur le plateau pour… quoi d’ailleurs ? Révolutionner l’Opéra de Paris ? Mettre des amateurs.trice qui ne savent pas danser sur la scène de l’Opéra (on rigolerait bien s’il s’agissait de chanteurs) ? Dire que l’on abolit la barrière entre la scène et la salle ? Faire « danser des corps non formatés » dixit l’auteur ? Vieilles idées qui ont fait leur temps et dont on sait qu’elles ne produisent rien de plus que de « louables » intentions, de celles qui pavent l’enfer. Car Jérôme Bel, se sert de ces personnes sur fond de mésintérprétation du premier article de la Déclaration des Droits de l’homme pour travailler à sa propre gloire.

Agnès Izrine

Jusqu'au 20 février 2016 - Palais Garnier.

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