Steven Cohen, auteur et interprète de sa performance « Coq », a été condamné par la 28e chambre correctionnelle… à ne pas payer d’amende ! Mais le tribunal l’a tout de même trouvé coupable. Pas assez, peut-être. Mais pas assez sage non plus pour prononcer un non-lieu.
Le message est clair: La liberté artistique ne vaut plus grand-chose au « pays des Droits de l’Homme ». On a une esplanade pour s’en souvenir, face à la Tour Eiffel, un joli belvédère ouvert aux touristes, mais moins ouvert aux arts.
Cette condamnation à taux zéro n’est que prêtée à Steven Cohen. Il n’en est que le dépositaire. Elle s’adresse avant tout aux autres artistes qui auraient l’idée de s’exprimer trop librement. C’est pourquoi il faudrait que les artistes dans leur ensemble, à travers leurs syndicats et associations, soutiennent un pourvoi en cassation. Car faire appel demande des ressources considérables. Un artiste comme Steven Cohen n’en dispose pas et le tribunal le sait fort bien. « Mon avocate, Me Agnès Tricoire, ne souhaite pas faire appel et il serait difficile d’en changer », regrette Cohen, désormais fiché comme un criminel.
Cette sentence s’adresse surtout à ceux qui s’expriment par le corps et dans l’espace public. Et on ne peut s’empêcher de penser à la Russie de Poutine, lequel vient d’interdire l’utilisation de mots « vulgaires » dans les spectacles. Certes, on ne songe pas encore, en France, à une situation où la justice condamnerait des artistes pour des propos tenus dans le cadre d’une production dramatique jouée en salle. Pas encore…
Mais il y a eu les manifestations contre les spectacles de Romeo Castellucci et Rodrigo Garcia. Les mouvements intégristes prennent de l’ampleur, portés par la droite « décomplexée » et l’extrême droite, plus décomplexée encore. La porte est désormais un peu plus ouverte pour aller vers un cas du type Pussy Riot en France. La condamnation de Cohen vise aussi les Femen. Et puis après? L’ambiance de fond d’une société peut changer subitement, tel un volcan qui se met à cracher. Une décision de justice apparemment anodine peut contribuer à faire sauter des verrous moraux.
Mais pour l’heure, le mal sera surtout fait à l’étranger. Il est désormais facile pour des potentats populistes à la Poutine ou Erdogan de pointer vers la France: Vous voyez, chez eux aussi… Ils ne regarderont pas le montant de l’amende. Condamné, c’est condamné.
Thomas Hahn
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