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Huitième édition de Cluny Danse

La compagnie Le Grand Jeté signe une programmation riche et éclectique qui se produit dans les splendides lieux de l’ancienne abbaye bénédictine.

Frédéric Cellé de la compagnie Le Grand jeté a concocté une huitième édition qui s’est déroulée du 14 au 19 mai sur le territoire bourguignon. Tout d’abord dans les villes de La Guiche, Bonnay et Mazille, le festival Cluny Danse a proposé de nombreuses sensibilisations à la danse sous forme de forum et représentations.  Puis, à Cluny, en guise de clôture sur un week-end, étaient programmés des rencontres, une mégabarre, un flashmob, un repas partagé, une masterclass, des stages parents/enfants, un plateau amateur et surtout neuf spectacles totalement gratuits dont une première en France de Go Figure out Yourself de Wim Vandekeybus.

Dans une ambiance très chaleureuse, sous un ciel gris menaçant mais, fort heureusement sans pluie, Frédéric courait partout avec son mégaphone pour diriger le public d’un lieu à l’autre afin de ne pas rater le début des représentations. Car il faut lui attribuer cet excellent choix d’occuper des places, des jardins, des rues de Cluny qui permettaient ainsi de découvrir la splendeur de cette ville.

Soutenu par une trentaine de bénévoles, Frédéric Cellé réalise ses objectifs de réinventer la notion de spectateurs et d’innover dans l’espace public. « Grâce à Virginie Goutayer, l’administratrice adjointe des monuments nationaux pour l’Abbaye de Cluny, nous avons l’autorisation d’occuper tous les lieux souhaités. Soit donner vie à des emplacements historiques par le biais de la danse contemporaine. »

En huit ans, Cluny Danse a évolué au point que plusieurs structures de la région collaborent au festival : le lab – association culturelle régionale pour le spectacle vivant, Viadanse-CCN de Belfort, la scène nationale de Macon, Art Danse CDC Dijon et la ville de Cluny.

Samedi en début de soirée, au Farinier, une salle splendide avec sa très haute et imposante charpente en bois, première en France de Go Figure Out Yourself de Wim Vandekeybus.

Alors que le public est debout disséminé un peu partout, cinq danseurs (trois femmes et deux hommes) apparaissent les uns après les autres. Le sourire aux lèvres, l’un parle longtemps en s’adressant directement à chacun. Il évoque l’amitié, le vivre ensemble avec un humour délicieux. Contrairement au rapport scène/salle, les quelques trois cent spectateurs se sentent directement concernés par ces phrases énoncées en français et en anglais. La suite est toute aussi délirante et pleine d’humour.

La danse très dynamique engendre des déplacements de foule, les paroles font rire et l’ensemble donne le sentiment que nous sommes tout un groupe d’amis réuni pour partager ces moments exquis. Le plus souvent, un danseur invite un spectateur pour une valse ou pour le suivre dans son mouvement. L’extrême générosité des artistes incite au partage et à prendre part à ce parcours imprévisible et passionnant.

Bien que l’écriture chorégraphique de Wim Vandekeybus soit reconnaissable avec ses pas toujours aussi périlleux, il arrive dans cette pièce à explorer avec délicatesse et grande intelligence les frontières entre public et acteurs. Un moment unique et réjouissant dans un cadre exceptionnel en hommage à la danse et à la sensibilité.

Bien plus tard, la compagnie Bilbobasso a embrasé la place du marché de Cluny avec Amor. Delphine Dartus et Hervé Perrin forment un couple de danseur de tango qui passe en un clin d’œil de l’amour à la violence. Mais là, les flammes du désir et celles de la discorde sont réelles car tout est prétexte à s’enflammer. Inventifs dans l’art du feu, flammèches, fumée, étincelles colorées et flammes rehaussent les banalités du quotidien. Un opus très drôle et diablement bien pensé.

Le seul bémol, samedi après-midi, caprice de star de la part du brésilien Volmir Cordeiro qui a refusé au dernier moment de danser à l’extérieur alors qu’aucune ondée n’était prévue. Le temps de mettre la salle de repli en fonction, les spectacles suivant ont tous débuté avec un important retard. Mais pourquoi cette lubie alors que sa pièce, Rue, est bien plus une improvisation incompréhensible et parfois très violente qu’un ouvrage très écrit ? Pas de danse, juste des sauts et des roulades rapides au sol quitte à risquer de faire tomber des spectateurs.

Dimanche, les nombreux touristes qui ont envahi la cité ont découvert par hasard le Collectif Zou sur la place du monument 39-45.

Dans Limites, la danseuse et chorégraphe Cloé Vaurillon y raconte le passage de l’adolescence à l’adulte. De contraintes au dépassement de soi, elle possède un réel tempérament et une présence évidente. Une jeune artiste à suivre.

C’est au parc abbatial que Vivace d’Alban Richard se conjugue comme un voyage chorégraphique sur des musiques très diversifiées allant du baroque à l’électro. Un duo d’hommes qui s’empare des rythmes et des pulsions afin de dessiner toutes les variétés de mouvements dansé. Un cadre idéal pour une pièce charmante.

Enfin, reprise au Narthex, d’Oscyl, d’Héla Fattoumi et Éric Lamoureux qui ont retravaillé leur pièce initiale sous forme de variation. Un résultat étourdissant et intense tant la proximité avec les formidables interprètes qui dansent avec les sculptures inspirées de Hans Arp, fait naître encore plus de puissance, de poésie et d’humour. Un final de Cluny Danse à la hauteur de ce festival.

Mais n’oublions pas les trente danseurs amateurs qui ont présenté quelques minutes de leur travail en amont de la plupart des spectacles.

Comme le dit Frédéric Cellé : « Cette nouvelle édition est à l’image de notre monde, surprenante, multiculturelle, mouvante et terriblement humaine ». Entre convivialité, générosité, variété des spectacles programmés et ambiance si chaleureuse, il réunit tous les ingrédients qui font la réussite d’un festival. « Un festival qui vit, qui vibre, qui va à la rencontre de chacun de nous dans la plus grande affection. » conclut-il.

Sophie Lesort

Spectacles vus à Cluny les 18 et 19 mai 2019

Go Figure Out Yourself, chorégraphie de Wim  Vandekeybus, les 10 et 11 octobre à Forbach

Amor, de la compagnie Bilbobasso, le 17 juillet à Vannes le Châtel (54), le 27 juillet à Arles-sur-Tech (66)

Vivace, chorégraphie d’Alban Richard, avec Anthony Barreri et Yannick Hugron, le 6 juillet à Jaujac, festival Format (Ardèche)

Oscyl Variation, chorégraphie d’Héla Fattoumi et Éric Lamoureux, le 9 juin au Château de Ray-sur-Saône.

 

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